2023/04/27:’Structuration d’investissements immobiliers français : jurisprudence récente.’

Le monde a publié un article qui devrait passionner plus d’un amateur de fiscalité internationale.

Il y est question d’un montage d’évitement des plus-values en France, dont les professionnels de la fiscalité sont (ou plutôt étaient) familiers. Celui-ci consiste à structurer la détention de biens immobiliers français à travers des sociétés établies au Luxembourg. L’idée est simple: jusqu’il y a peu, le pouvoir d’imposition des plus-values revenait au Luxembourg (et pas à la France), sur le fondement de la convention préventive de la double imposition franco-luxembourgeoise (« CPDI »). Comme le Luxembourg n’imposait pas la plus-value, celle-ci n’était taxée nulle part (situation de double non-imposition).

L’article du Monde revèle ainsi qu’une société luxembourgeoise a été reconnue coupable de fraude fiscale par le tribunal correctionnel de Paris pour « avoir fait circuler quatre immeubles parisiens entre plusieurs sociétés au Luxembourg et en France dans un but exclusivement fiscal, pour éviter 4 millions d’euros d’impôts sur les plus-values ». La mise en place « d’un système d’évitement généralisé de l’impôt sur les plus-values immobilières sur des immeubles parisiens » est évoquée. La société luxembourgeoise intercalée a été désignée par la justice française comme une « coquille vide n’ayant été créée qu’à des fins de fraude fiscale ».

A noter qu’aujourd’hui, les montages d’optimisation fiscale reposant sur la détention de sociétés immobilières françaises par des sociétés luxembourgeoises, dans l’optique de la réalisation d’une plus-value sur les actions de la société française (par la société luxembourgeoise) en exonération d’impôt (tant en France -sur le fondement de la CPDI- qu’au Luxembourg – grâce au privilège mère-filiale luxembourgeois) est devenu inefficace à la faveur des modifications apportées au cours des dernières années à la convention franco-luxembourgeoise de 1958. Epinglons ici l’avenant du 5 septembre 2014, qui a conféré à la France le pouvoir d’imposer les plus-values réalisées lors de la cession d’actions de sociétés à prépondérance immobilière (détention >50%, directement ou indirectement, d’immeubles situés en France).

De manière générale, penser pouvoir utiliser des sociétés intermédiaires (au Luxembourg) « artificielles » à des fins purement fiscales -en vue de bénéficier de la protection d’une CPDI- relève de la gageure, eu égard à la multiplication de mesures anti-abus sur la scène fiscale internationale (par exemple le nouveau Principle Purpose Test « PPT » inséré dans la CPDI franco-luxembourgeoise).

Denis-Emmanuel Philippe