2020/07/14: L’Echo: Les entreprises frappées par le Covid pourront éponger leurs pertes

Avec le dispositif «carry back», les entreprises en difficulté pourront se faire rembourser de l’impôt précédemment payé. Attention toutefois à estimer correctement la perte.

 

Parmi les mesures fiscales visant à voler au secours des sociétés belges, il y a une mesure exceptionnelle publiée au Moniteur le 1er juillet 2020: le «carry back» de pertes fiscales.

Ce système donne un bol d’air frais aux entreprises en difficulté, puisqu’il ouvre la possibilité de déduire les pertes fiscales de 2020 des bénéfices de 2019.

Jusqu’ici, le droit fiscal belge ne prévoit que le «carry forward», permettant la déduction des pertes antérieures sur les bénéfices futurs. Ce système présente l’inconvénient de ne donner un bol d’air à l’entreprise qu’après son rétablissement, et non au moment où elle en aurait le plus besoin. Le carry back permet au contraire, avec l’imputation des pertes sur des bénéfices réalisés lors d’exercices antérieurs, le remboursement des impôts précédemment payés sur des bénéfices antérieurs.

 

Déduction anticipée

Prenons un exemple chiffré. Une société clôture son exercice comptable le 31 décembre 2019 avec un bénéfice imposable d’un million d’euros. Elle s’attend à subir une perte de 700.000 euros lors de l’exercice comptable 2020 en raison de la crise sanitaire. Jusqu’à présent, elle n’avait d’autre choix que de reporter sa perte fiscale de 700.000 euros sur les exercices futurs (système du «carry forward»).

Avec le carry back, la société pourra demander l’exonération du montant de la perte estimée de 700.000 euros. La base imposable sera ainsi ramenée à 300.000 euros pour l’exercice comptable 2019 (exercice d’imposition 2020). L’impôt dû pour l’exercice comptable 2019 diminue, de sorte qu’une partie ou la totalité des versements anticipés effectués en 2019 sera remboursée. «Autrement dit, la société recevra sur un plateau d’argent des liquidités de l’Etat !»,
résume Denis-Emmanuel Philippe,  avocat-associé chez Bloom. L’exonération résultant de cette déduction anticipée de la perte devra ensuite faire l’objet d’une reprise l’année suivante, de telle sorte que la perte de 2020 (déduite de manière anticipée) soit bien neutralisée et ne puisse pas être à nouveau déduite.

Sont exclues du régime: les sociétés qui ont des liens avec les paradis fiscaux et celles qui ont distribué des dividendes au cours de la période du 12 mars 2020 (début du «lockdown») jusqu’au jour de l’introduction de leur déclaration relative à l’exercice d’imposition 2021.

«Le carry back ou déduction anticipée des pertes est un merveilleux outil fiscal pour aider les entreprises à passer le cap de la crise», estime Denis- Emmanuel Philippe.

La loi porte sur les bénéfices antérieurs réalisés lors d’un exercice comptable clôturé au cours de la période allant du 13 mars 2019 au 31 décembre 2020. Mais rien n’empêche toutefois une société de choisir d’imputer la perte subie en 2021 (exercice d’imposition 2022) sur le bénéfice réalisé lors de l’exercice comptable clôturé le 31 décembre 2020. Elle pourrait y avoir particulièrement intérêt dans l’hypothèse où elle a subi les effets de la crise en 2021 plutôt qu’en 2020.

 

Difficile estimation

Bien qu’attrayant au premier abord, le dispositif nécessite une certaine vigilance. Notamment pour ce qui est de l’estimation de la perte subie en 2020. Au moment de l’introduction de la déclaration fiscale, la perte fiscale de la période imposable suivante est encore incertaine. «Les entreprises désireuses de profiter au maximum du carry back ont intérêt à ne pas surestimer le montant de la perte», recommande Denis-Emmanuel Philippe. Un mécanisme de sanction, prenant la forme d’une cotisation spéciale à l’impôt des sociétés, a été prévu pour le cas où les pertes déduites par anticipation dépasseraient finalement les pertes effectivement subies (une tolérance de 10% est appliquée).

Le fiscaliste pointe aussi un certain degré d’urgence: «Les sociétés qui veulent déduire leur perte de 2020 sur leurs bénéfices réalisés lors de l’exercice clôturé le 31 décembre 2019 devraient en principe solliciter l’application du régime dans la déclaration
ISOC relative à l’exercice d’imposition 2020 (exercice 2019) qui devait être rentrée le 24 septembre 2020.» La date butoir pour
rentrer les déclarations d’impôts des sociétés vient toutefois d’être reportée d’un mois, au 29 octobre. Reste une dernière question:
comment va-t-on financer ce cadeau fiscal? Denis-Emmanuel Philippe pointe à cet égard une certaine largesse du régime puisque même les pertes non liées à la crise du Covid peuvent être utilisées. «J’ai l’intime conviction que l’État se montre beaucoup trop généreux en ces temps de crise, en offrant des cadeaux à tout-va sans se poser la question de leur financement.»

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